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Promesse de vente / Requalification d’une indemnité d’immobilisation en clause pénale

Cass. Civ III : 24.9.08
N° de pourvoi : 07-13.898


Une promesse synallagmatique de vente, conclue sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt, contenait une clause prévoyant que le dépôt de garantie versé par l’acquéreur resterait acquis au vendeur « à titre d’indemnité d’immobilisation » en cas de défaillance de la condition suspensive due à la faute de l’acquéreur.

Suite à la non obtention du crédit par l’acquéreur qui a sollicité un prêt d’un montant supérieur à celui prévu dans le contrat, le vendeur réclame le paiement de l’ «indemnité d’immobilisation».
La Cour d’appel fait droit à sa demande mais l’arrêt est censuré par la Cour de cassation qui considère que l’indemnité, telle qu’elle est prévue dans l’avant-contrat, constitue, non pas une somme forfaitaire destinée à indemniser le vendeur du préjudice lié à l’immobilisation de son bien, mais une clause pénale dont le montant est susceptible d’être diminué par le juge (code civil : art.1152).

Rappelons que l’indemnité d’immobilisation est la contrepartie financière de l’option laissée au bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente qui peut, à l’issue du délai qui lui est imparti, décider de renoncer à l’acquisition du bien. Elle rémunère alors le promettant qui, pendant la durée de l’option laissée au bénéficiaire, s’est interdit de disposer de son bien.
L’objet de la clause pénale est tout autre : il s’agit de prévoir à l’avance et de manière forfaitaire le montant des dommages et intérêts dus par le débiteur en cas d’inexécution de ses obligations.
 
En pratique, la confusion naît de l’appellation de ces clauses dans les avant-contrats souvent désignées comme clauses « d’indemnité d’immobilisation ». Or, selon l’objet qui leur a été assigné par les parties, elles sont susceptibles d’être qualifiées de clauses pénales.
Tel est le cas en l’espèce : la Cour de cassation requalifie en clause pénale la clause qui prévoit que le dépôt de garantie versé par l’acquéreur reste acquis au vendeur « à titre d’indemnité d’immobilisation » en cas de défaillance de la condition suspensive due à la faute de l’acquéreur.

Plusieurs éléments ont conduit les juges à la requali-fication en clause pénale.

Tout d’abord, la faute de l’acquéreur était précisée dans la clause ; il était prévu qu’elle pouvait résulter « du fait de s’abstenir de toute demande de prêt, ou de fournir les justifications exigées par la banque ou encore de refuser sans motif légitime les offres de prêt ».
Le fait que la clause litigieuse fasse expressément référence à la faute de l’acquéreur démontre que son objet était d’indemniser le promettant en cas d’inexécution de l’obligation de diligence pesant sur l’acquéreur dans la recherche d’un prêt.
Or, une clause d’indemnité d’immobilisation aurait joué en cas de défaillance de la condition quelle qu’en soit la cause et indépendamment de toute notion de faute du bénéficiaire.

Par ailleurs, la nature de l’acte dans lequel est stipulée la clause litigieuse a sans doute joué en faveur de la requalification en clause pénale. Les parties ont conclu une promesse synallagmatique de vente (et non une promesse unilatérale) qui ne donne aucune option à l’acquéreur, ce dernier ayant déjà donné son consentement.
Or, une clause d’indemnité d’immobilisation, en ce qu’elle indemnise le vendeur si l’acquéreur ne lève pas l’option, n’est juridiquement envisageable que dans une promesse unilatérale qui ne met aucune obligation à la charge du bénéficiaire et laisse à ce dernier l’option d’acquérir ou non.

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